Registre gratuit mettant en lien les agriculteurs en vue de l’achat ou de la vente de fumier
Par Lilian Schaer
Pour les éleveurs de bétail, le fumier est susceptible de poser des défis importants. Au pire, c’est un déchet qui doit être éliminé, et au mieux, il constitue une source d’éléments nutritifs qui nécessite de la planification et du travail pour être entreposée et gérée de façon appropriée, en particulier dans les grandes exploitations agricoles.
Au lieu de le considérer comme un déchet à éliminer ou comme une source de problèmes à régler, certains spécialistes de la gestion des éléments nutritifs mettent en avant la valeur économique du fumier afin d’encourager un changement de perception à cet égard.
L’analyse du fumier se révèle un excellent moyen pour établir la valeur nutritive du fumier d’une exploitation agricole, contribuant ainsi à réduire les coûts des engrais chimiques. Elle permet également de déterminer une valeur pour la vente éventuelle d’un produit qui augmente la teneur du sol en matière organique tout en fournissant des macronutriments et des micronutriments indispensables et en soutenant la biologie du sol essentielle.
Certains agriculteurs ont entrepris des dispositions auprès d’autres agriculteurs de leur région, comme les producteurs de cultures commerciales sans bétail, afin d’épandre du fumier sur leurs terres cultivées.
Andy de Vries achète depuis des années du fumier pour son exploitation de cultures commerciales au sud de Mitchell auprès de deux exploitations d’élevage voisines. Étant donné qu’une grande partie des éléments nutritifs de la ration alimentaire passe à travers l’animal pour se retrouver dans le fumier, il estime que celui-ci est plus rentable que les engrais chimiques.
L’épandage de fumier lui coûte en moyenne 40 à 60 dollars par acre, selon l’analyse et le type de bétail dont provient le fumier. Lorsqu’il achète du lisier, il prélève un échantillon toutes les heures pendant le pompage afin d’obtenir un échantillon composite qui est envoyé au laboratoire, puis il paie l’agriculteur vendeur en fonction des valeurs relevées de potassium et de phosphore.
M. de Vries est également partenaire de Crop Quest, et lorsque les conditions climatiques difficiles de l’automne 2018 ont entravé la réalisation des travaux d’automne dans les champs, dont l’épandage de fumier, il a commencé à réfléchir à la manière dont les agriculteurs pourraient s’entraider pour résoudre la question de surplus de fumier.
Ce fut le catalyseur de la création du registre du fumier en ligne de Crop Quest, un service gratuit où les agriculteurs peuvent s’inscrire s’ils ont du fumier en surplus ou s’ils sont à la recherche de fumier pour leurs terres.
« L’objet du registre est de créer des liens de proximité entre les gens – la distance maximale entre exploitations agricoles étant de huit ou neuf kilomètres au maximum », explique M. de Vries.
« Il s’agit de faire en sorte que les gens reconnaissent la valeur du fumier. Des milliers d’acres de terres n’ont jamais reçu de fumier, et ce sont ces terres qui pourraient en bénéficier le plus », ajoute-t-il. « L’idée est de sensibiliser davantage les gens à la valeur du fumier sur ces terres ».
M. de Vries a créé le site en collaboration avec Mme Christine Brown, spécialiste de la durabilité des grandes cultures au ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Affaires rurales de l’Ontario (MAAARO). C’est un site de renseignements avant tout. Les agriculteurs participants assument la responsabilité de toutes les dispositions qu’ils jugent nécessaires pour l’achat ou la vente de fumier. Le site est accessible à tous, et pas uniquement aux clients de Crop Quest.
Un logiciel d’application en cours de développement permettra d’automatiser la tenue des registres nécessaires au respect du plan de gestion des éléments nutritifs. Les applicateurs de fumier mettent à jour le logiciel en indiquant simplement la quantité de fumier qui a été épandue sur un champ donné et la date de l’épandage. Selon M. de Vries, cette idée est venue de quelques grands exploitants qui épandent fréquemment du fumier et qui cherchent une solution pour simplifier la tenue des registres.
Tout cela rejoint le concept de Mme Brown relatif aux plans de voisinage pour la gestion des éléments nutritifs, fondés sur les niveaux de fertilité des sols à l’échelle locale. Selon elle, épandre des éléments nutritifs supplémentaires sur un champ dont le niveau de fertilité est élevé, c’est comme mettre de l’argent dans un compte d’épargne à faible taux d’intérêt : ces éléments nutritifs sont appréciables, mais la culture n’en a pas besoin tant que « l’épargne n’est pas épuisée ».
Mme Brown estime qu’un plan de voisinage est élaboré en coopération avec les exploitations d’élevage et de cultures commerciales. Idéalement, un consultant en gestion des éléments nutritifs indépendant ou un consultant 4B devrait compléter les documents, en y ajoutant les cartes, les calendriers de rotation des cultures, les analyses de fumier et les analyses de sol fournis par les exploitations agricoles coopératrices.
« Les exploitations agricoles recevant du fumier pourraient échanger de la paille ou payer le coût de la valeur équivalente en engrais des éléments nutritifs disponibles en échange de micronutriments et de matière organique », explique-t-elle, en ajoutant que l’éleveur recevrait un avantage financier pour des éléments nutritifs qui, autrement, prendraient de nombreuses années à être rentabilisés.
Des plans de voisinage à long terme pourraient explorer des possibilités telles que des installations d’entreposage supplémentaires ou même des pipelines, afin que le fumier puisse être épandu à partir d’un lieu central pour réduire les coûts de transport et les problèmes routiers.
De plus amples renseignements sur l’intendance du fumier et les options de gestion des éléments nutritifs à long terme se trouvent à l’adresse suivante : https://www.farmfoodcareon.org/timing-matters/ (en anglais seulement).
Cet article est fourni par Farm & Food Care Ontario dans le cadre du projet Timing Matters. Le Partenariat canadien pour l’agriculture est un engagement de cinq ans pris par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux du Canada en vue d’encourager l’innovation, la compétitivité et la durabilité dans l’industrie agricole canadienne.
Reviewed 06/19/2020